La médiation numérique pendant le confinement : états de lieux et perspectives
Faisons un bilan de cette période riche en enseignements sur notre capacité d’adaptation !
Après le confinement du printemps qui a conduit les bibliothèques à fermer leurs portes au public et à bouleverser leurs offres de services (en mettant en valeur notamment leur offre de ressources numériques), la BDVO a lancé pendant l’été un Brainstorm et un questionnaire sur les pratiques professionnelles de médiation numérique pendant cette période dans les bibliothèques du Val d’Oise.
Que ce soit avec des ressources propres ou des ressources extérieures gratuites ou payantes, les bibliothécaires ont réagi pendant les deux mois afin de proposer des services à leurs usagers et garder le contact : ressources via les portails, les réseaux sociaux ou par messagerie électronique. Un engouement pour les ressources électroniques est visible par la courbe ascendante des connexions et des nouvelles inscriptions au printemps. Parallèlement, les bibliothèques ont proposé des animations en ligne sous diverses formes et tout cela avec les moyens du bord.
Nous revivons en ce mois de novembre cette situation exceptionnelle et cet état des lieux/bilan est l’occasion de s’emparer de ces événements pour améliorer et développer nos connaissances et renouveler nos services. C’est l'occasion de repenser ce qu’il est possible de proposer aux usagers grâce aux outils de la médiation numérique et de développer l’offre de ressources électroniques et leur accompagnement en ligne, les animations et les nouveaux services depuis notre poste travail sur site ou en télétravail mais sans public.
LA PARTICIPATION DES BIBLIOTHÈQUES ET DES BIBLIOTHÉCAIRES DES TERRITOIRES
Lancé en juillet, le brainstorm s’adressait aux responsables de structures ou responsables de la médiation numérique et avait pour but de recenser les actions mises en œuvre pendant le confinement. En parallèle, un questionnaire destiné aux bibliothécaires réseaux avait été diffusé pour recueillir les situations professionnelles, leurs postures et les difficultés rencontrées au quotidien.Nombre de répondants au Brainstorm et au questionnaire (source Euterpe Consulting)
Les résultats suivants ne sont pas exhaustifs mais donnent à voir le dynamisme et la réactivité des bibliothèques pendant le confinement sanitaire et les questionnements professionnels, qui amènent à une réflexion sur les postures et l’adaptation des services aux usagers dans le Val d’Oise.
Brainstorm réalisé sur Klaxoon en mode asynchrone
LES ACTIONS DE MÉDIATION NUMÉRIQUE PROPOSÉES DANS LE VAL D'OISE
Panorama non exhaustif des actions de médiation numérique menées dans le Val d’Oise : https://padlet.com/embed/dpj1kug40wv353l0
Des actions très variées et une grande absente : l’inclusion numérique
Cette situation de confinement, exceptionnelle, extraordinaire et soudaine, a surpris et décontenancé bon nombre de collègues qui, pour la plupart, ont su rebondir, s’adapter, comme le montre le retour sur les actions variées mises en place. Toutefois, un champ d’action a été oublié : celui de l’inclusion numérique. Dans la situation renouvelée de confinement que nous connaissons aujourd’hui, nous pouvons en tirer des enseignements et améliorer nos services.
Le premier confinement a notamment mis en valeur :
• le manque d’équipement et d’accès à internet des français en général ;
• l’isolement des personnes non équipées ;
• l’isolement des personnes qui avaient un PC ou une tablette connectée mais qui n’avaient pas la connaissance et l’usage des outils de visio-conférence pour communiquer ;
• l’inégalité d’équipement, d’accès et de savoirs numériques des enfants et adolescents qui devaient suivre l’école à la maison…
Pourtant, bon nombre d'actions à l’attention des publics éloignés sont possibles :
• les tutoriels vidéo pour former à l’utilisation de base d’une tablette, de Skype, Hangout, Google Meet ou Zoom, etc. ;
• l’aide individualisée par téléphone avec, en parallèle, l’utilisation d’outils tel que Teamviewer, pour aider à l’installation ou encore à l’utilisation d’applis ;
• le relais par Facebook et par mail pour communiquer sur les services distants proposés par téléphone : pour être réorienté, être mis en relation avec un écrivain public ou avec un service administratif ;
• le prêt de matériel (tablettes, par exemple, qui n’étaient plus utilisées et rangées dans les armoires) ;
• les tutoriels vidéo et les courtes présentations en live sur les réseaux à l’attention des jeunes et des parents : sur l’arborescence des fichiers sur un PC, sur les formats de fichiers, sur le dépôt d’un devoir sur un cloud, sur l'intégration d'une pièce jointe à son mail, etc.
LES OUTILS, LES LOGICIELS ET LES APPLICATIONS UTILISÉS PAR LES BIBLIOTHECAIRES
Une adaptation des professionnels malgré le manque de moyens, d’outils et parfois d’organisation
Si 68 % de répondants ont pu faire de la médiation numérique pendant le confinement, l’enquête montre que les bibliothécaires ont su faire avec les moyens du bord : les 2/3 d’entre eux ont travaillé depuis leur propre matériel. Ils ont dû s’adapter et apprendre à utiliser certains outils éloignés de leur pratique, pour assurer la médiation numérique : réseaux sociaux, outils de curation et de veille professionnelle, réalisation de vidéo…
La plupart des répondants ont pu poursuivre un travail d’équipe, mais on peut noter que 22 % d’entre eux n’ont pas eu de contact avec les membres de leur structure.
Ce confinement brutal a mis à l’épreuve les capacités d’adaptation des équipes et le management des personnels. Ceci en raison d’un manque de matériel et de moyens mis à disposition, de l’absence de pratique d’outils collaboratifs en ligne, et d’une répartition des tâches déséquilibrée, selon la possibilité de télétravailler ou non.
Cette période a également été, pour nombre d’entre eux, un temps d’expérimentation : pour s’adapter et réaliser leurs missions, ils ont été amenés à tester et utiliser des outils numériques divers afin de maintenir les échanges avec les collègues. Nous pouvons remarquer que les outils de visio-conférence ont été peu investis pour communiquer avec le public, alors même que les équipes l’utilisaient pour 38% d’entre elles en interne.
E-LEARNING ET CONFINEMENT
Le confinement : un temps de découverte, de formation en ligne et d’autoformation
Le confinement aurait pu être le moment idéal pour se former à distance et peut-être découvrir de nouveaux formats de formation : regardons de plus près l’expérience de formation qu’ont pu avoir les répondants au questionnaire…

Le confinement : une occasion de tester les formations ou l'autoformation en ligne, et de changer les habitudes
La moitié des répondants a profité du confinement pour se former ou s’auto-former. Les formats de formation en ligne sont divers et le taux d’engagement des stagiaires est inégal. La formation demande de repenser les contenus, d’adopter une autre stratégie pédagogique pour répondre aux exigences de l’exercice : l’attention est moins longue et, moins soutenue en mode visio, les temps de formations doivent alterner exposés, questions, tests, quiz… et différents types de media pour soutenir l’attention et faciliter l’apprentissage.
D’autre part, dans ce contexte, les formats courts ont été privilégiés la plupart du temps par les stagiaires, mais les avis - notamment sur les webinaires ou sur les vidéos - sont mitigés. Les formats plus longs, comme les MOOC ou les formations en ligne pensées pour la formation en distanciel, ont été plus appréciés par les participants, même si ces formats ont été minoritaires dans la présente étude.
A la BDVO, en raison de la COVID-19, nous avons adapté en distanciel la formation « Accueillir et accompagner les publics éloignés du numérique » prévue à l’origine en présentiel. Cela a été l’occasion pour Euterpe consulting de développer un "Campus digital" permettant de concevoir une formation adaptée à la situation sans perte de niveau de contenu. Le tout en mobilisant l’engagement des participants : en alternant temps en présentiel en ligne, temps asynchrones, TP accompagnés en petits groupes, et ce, afin de proposer une formation méthodologique et pratique et de créer une dynamique de groupe malgré la distance.
Cette première expérience a été appréciée par les stagiaires qui ont pu prendre le temps pour la réflexion et la réalisation de travaux pratiques ; même si certains ont pointé un investissement personnel plus important en raison du travail à domicile.
Nul doute que l’un des effets positifs du confinement aura été l’occasion, pour les bibliothèques et les bibliothécaires, de sauter le pas et de tester la formation en ligne et de découvrir les atouts de ce type de formation : limitation des déplacements, possibilité aux personnes seules sur leur poste de se former malgré tout, accès à des formations dans un format plus souple qui peut s’adapter aux contraintes d’organisation d’équipe, et un temps de réflexion plus long pour assimiler les notions, penser et construire un projet… Même si celles-ci ne sauraient s’adapter à toutes les thématiques, notamment celles qui nécessitent de la pratique d’outils, de jeux de rôle et mises en situation.